10/06/2018

Quotidien sur le fil: création d'un collectif sur Tours! - La fenetre de feg

Quotidien sur le fil: création d'un collectif sur Tours! - La fenetre de feg

Quotidien sur le fil: création d'un collectif sur Tours!

17 Mai 2018, 17:28pm
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Publié par Féli-icie

Je m’appelle Félicie, j’ai 33 ans et je suis infirme moteur cérébral athétosique. Cette pathologie se caractérise par des mouvements et contractions involontaires accompagnés de difficultés d’élocution. Ces signes qui s’amplifient lors du moindre facteur émotionnel et environnemental,  n’altèrent en aucun cas ma lucidité. Cependant, ce corps qui explose et cette voix qui déraille peut facilement interférer dans la communication avec autrui.
Si j'écris aujourd’hui, c’est pour exposer une situation alarmante. Une situation qui, à quelques nuances près, est celle de nombreuses personnes handicapées.
Il y a sept ans, j’ai eu le bonheur d’accéder à une vie de citoyenne à part entière et ce, en m’installant chez moi, dans mon appartement adapté. Que l’on se dise maintenant, vivre chez soi quand on est dans mon type de situation ne signifie pas : « Attendre que la vie passe, en ayant du personnel tout gentil, tout dévoué à disposition ! » Clairement, il faut arrêter avec ce genre de cliché. La réalité est bien tout autre. Et justement, en m’installant à domicile, je savais qu’un combat m’attendait, mais j’étais certainement loin de me douter qu’il serait aussi ardu. Comme pour tant d’autres, j’ai une vision assez claire de l’autonomie : « Je suis certes dépendante ‘’physiquement’’ pour un bon nombre de gestes mais ma pleine conscience me permet d’en décider librement les actions. Je suis donc, ce qu’on appelle dans notre petit jargon : « dépendante-autonome ». Une notion que m’a inculqué le centre de formation à l’autonomie, l’institut du mai de Chinon,  m’ayant permis de sortir du monde institutionnel. En ce sens, ce centre m’a également fait comprendre que l’autonomie chez une personne handicapée, n’est pas de tout faire seule physiquement parlant, démarche qui m’avait depuis toujours, été enseignée. C’est certain, ce n’est pas enfiler un pantalon, des chaussettes et mes chaussures en 15 mn, qui me fera gagner ma vie et mon énergie.
Pourtant, à l’heure actuelle, la réalité ressemble bien à cette dernière. Je fais clairement des tâches qui devraient être soulagées par les auxiliaires de vie. Pourquoi ? D’abord en sept ans, près de deux cent aides à domicile sont passées chez moi.  Si je dis « aides à domicile », et sans dénigrement aucun, c’est que la plupart d’entre elles ne sont pas véritablement  formées. Elles sont formées sur le tas. Deux, trois gestes et postures, quelques consignes, et hop, elles sont opérationnelles. Cependant, même au sein des écoles d’auxiliaires de vie,  je pense qu’il manque un véritable bagage. Celui de l’accompagnement, du handicap, mais aussi, du savoir-être, ou du moins, de l’approche professionnelle. Aujourd’hui, c’est concrètement ce qui manque dans l’aide à domicile. En mon sein,  soit je suis infantilisée, soit on veut m’imposer des choses, soit les automatismes sont rapidement pris. Dans tous les cas,  et il est bien difficile d’exprimer quelconque objection, donc d’être pleinement dans l’échange. Ce sans parler d’abus de confiance dont j’ai déjà été spectatrice - pour ne pas dire victime. Et c’est certainement ce qui constitue le cœur du problème, la France considère la personne dépendante , qu’elle soit âgée ou handicapée, comme fragile et assistée au sens large du terme. Une vision qui ne peut qu’obstruer la relation d’aidant/aidé. On ne fait pas avec la personne, on fait à la place, ou pour la personne. Pourtant , pour le  vivre avec quelques professionnelles , de véritables binômes basés sur une relation naturelle et sincère existent !
 Si j’ai dû accueillir autant de monde, c’est notamment parce-que ma pathologie peu commune, impressionne. Une émotion, un énervement, le corps s’emballe, et je peux devenir exécrable – parlons franchement – et ce sous peine, d’une mauvaise compréhension et communication. Mais que l'on se rassure, toutes ne sont pas parties sous tensions. Avec le temps, j’ai dû apprendre à doser, à prendre  sur moi. Et en ce sens, j’ai dû également apprendre à modérer mon gros souci du détail qui les jours d’impatience, revient forcément au galop. Toujours est-il que, je suis forcée de constater que je dois continuellement former et informer les intervenantes qui pour beaucoup, manquent réellement d’application. Sans parler de minutie, il n’y a-t-il pas un minimum pour que la personne se sente bien chez elle ? Alors oui, je sais, j’exige que les choses  me soient demandées les choses mais même ça, elles ne le font pas, ou , de manière très furtive.
Ces temps-ci, je m’entends souvent dire que j’ai encore de la chance de pouvoir faire beaucoup de choses seule.  Avec ce turn-over quasi constant d’aides à domicile, j’ai dû développer la capacité à me débrouiller seule. Et justement, là se situe une autre partie du problème. Faisant appel à un service de prestataire, celui-ci a fini par savoir que quoiqu’il arrive, je parviendrai toujours à mes « faims ». Jusqu’à cette période de février dernier où mon employée principale est partie en congés. Durant trois jours complets, je n’ai eu personne. Je me demande encore comment j’ai fait, car concrètement si rien ne m’est préparé en terme de préparation vestimentaire, mais également, en terme de repas, je suis aussi bloquée qu’une personne alitée. Et dans ces cas-là, je peux vous dire que ma féminité en prend un coup. Je profite d’aborder ce sujet pour dire que le numéro d’astreinte qui existe depuis quelques années seulement, n’est réservé qu’aux salariées. Ne sait-on jamais, si les personnes aidées en abusaient ?  Pourtant, côté aides à domicile, et pour en avoir fait plusieurs fois les frais, les abus ne manquent pas.
Oui, je peux faire beaucoup de choses, mais jusque quand ? Jusqu’à ce que je dérape dans ma douche ? A quel prix ? A celui des douleurs, des contractions, de ma fatigue ? Pourtant, je n’ai plus confiance, j’ai peur. Voilà pourquoi, je me débrouille seule, et réserve encore une bonne partie de mon énergie dans la communication de mes autres demandes. J'ai également très peur de vieillir dans ma condition et dans un tel contexte.
J’aurai encore tant à dire mais je finirai sur l’extrême finesse et empathie que peuvent avoir celles qui sont chargées d’établir les plannings. Même si, de temps à autre, les choses semblent s’améliorer, il y a là aussi, un véritable travail d’information et de communication, à faire.  Parmi, les vertes et les pas mûres, une de mes connaissances souffrant de tétraplégie me raconte que récemment, on lui a fait comprendre que son cas était trop lourd pour mettre la même auxiliaire tous les jours, ou quasi tous les jours. Chaque matin, chaque soir, elle changeait. Sept, quatorze,  intervenantes sur une semaine ? Où est la vie digne là-dedans ? Où va-t-on ?
Alors même si tout n’est pas négatif, et que de véritables professionnelles existent - encore heureux et respect -, par ce message, je souhaite interpeller le plus grand nombre dans l’objectif de créer un collectif à Tours, de récolter un max de témoignages, d’aller faire de la sensibilisation dans des écoles d’auxiliaires, et enfin de trouver des outils pour une meilleure professionnalisation. Donc n’hésitez pas à partager en masse. Ensemble, nous sommes plus forts !

Merci !

Mademois’Elle Fég
Collectifhandicap.tours@gmail.com
www.la-fenetre-de-feg.com

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